
Antonio Giarola
Le Toucher (homme en train de bander sa main) 1660.
Comme je le soulignais dans mon précédent billet, Paris Tableau est un puissant stimulant car on y fait toujours de belles découvertes. Pour un amateur comme moi, sans formation en histoire de l’art, c’est formidable.
Cette année, mes « sens artistiques » se sont sentis émoustillés par cinq tableaux donnés à Antonio Giarola (1597-1674), peintre véronais dont j’ignorais jusqu’à présent l’existence. Cette série représente les cinq sens : le goût, l’odorat, la vue, l’ouïe et le toucher. Pour chacun des tableaux, l’artiste a pris pour modèle un homme barbu. A l’exception du vieillard symbolisant le Goût qui nous regarde et tient une chope, les quatre autres personnages sont absorbés par leurs activités. Le Toucher, peut-être le plus beau des cinq, panse sa main blessée. L’Ouïe regarde en arrière comme si un bruit retenait son attention alors qu’il tient d’une main un cor de chasse. La Vue est plongée dans la lecture d’un ouvrage volumineux posé sur une table couverte d’un tapis. L’Odorat, le visage tourné vers le haute, tient un encensoir et une coupe contenant de l’encens.

Antonio Giarola
L’Ouïe (homme avec un cor de chasse) 1660.
Les couleurs sont franches, presque modernes, la touche nerveuse mais parfaitement maîtrisée. Les cheveux et les barbes de nos cinq personnages sont naturels, sans coupes sophistiquées. Les plis des vêtements soulignent l’épaisseur et la qualité des étoffes. Le fond de trois des tableaux est neutre alors que le visage de l’Ouïe est cerné de lourds nuages annonciateurs de tonnerre et d’orage tandis qu’à l’arrière-plan de la Vue un paysage venteux accentue l’impression de tranquillité de l’intérieur dans lequel le modèle lit. Ces cinq sens sont magnifiques, d’un équilibre presque parfait.

Antonio Giarola
La Vue (homme lisant) 1660.
L’artiste, dit également « il Cavalier Coppa » était un proche collaborateur de Guido Reni. Il exécutait des copies d’après ses tableaux, afin de les mettre sur le marché. Giarola imitait avec habileté le style du maître tout en obtenant un résultat plus net, plus pur. Mais les cinq tableaux présentés par la galerie Maurizio Nobile montrent que Giarola avait également un style personnel. Datés de 1660, on y sent l’influence des peintres hollandais notamment de Frans Hals mais également une certaine solennité dans le traitement des personnages propre à l’Ecole Espagnole.

Antonio Giarola
L’Odorat (homme à demi-nu avec un encensoir) 1660.
Avec ces Cinq Sens, on se trouve en présence de tableaux majeurs d’un artiste jugé jusqu’à présent mineur. Un tel ensemble mérite l’attention d’un collectionneur passionné ou d’un musée. Allez vite les contempler à Paris Tableau. Vous avez jusqu’à dimanche.
Dernière précision : la galerie Maurizio Nobile en demande 800 000 euros. C’est un prix mais il n’a rien à voir avec ceux demandés pour des artistes contemporains médiocres mais « tendance ». Alors si vous le pouvez, n’hésitez-pas à céder à la tentation et laissez-vous enivrer par vos sens.

Antonio Giarola
Le Goût (vieillard avec une chope) 1660.
Paris Tableau 2015, du 11 au 15 novembre, Palais Brongniart, Place de la Bourse, 75002 Paris. Prix d’entrée : 15 euros.
Galerie Maurizio Nobile, 45 rue de Penthièvre, 75 008 Paris.
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